mardi, 02 décembre 2008
L'intellectuel et la Multitude (Rolf Dieter Brinkmann)
"Chaque jour je vis l’expérience physique et torturante du désaccord grandissant, du conflit aiguisé entre moi comme Individu et la Multitude sous la forme du trafic, du tintamarre des voitures. – Et je devrais être suffisamment masochiste dans ma tête pour parler au nom de la masse, de La Multitude ? – Je crois qu’il est grandement temps que chaque Individu parle d’abord au nom de l’Individu, du propre travail accompli et non au nom de la moyenne. – Cet abaissement, le fait d’intervenir pour la moyenne, l’idéologie officielle du jour : il m’apparaît dans l’état d’apathie actuelle, dans le risque d’être étouffé par la Multitude, par la moyenne donc, dans la réduction générale et visible de la conscience de soi qu’on ramène à la moyenne, comme une lame de rasoir qui servira à l’individu hors de la norme moyenne du tout-venant dans la rue à se trancher la gorge. / Pour moi, cela s’apparente à une automutilation de l’intellectuel, à laquelle le force la ribambelle dans la moyenne."
(Rolf Dieter Brinkmann, Rome, regards, Quidam Éditeur, p. 272 ; cité sur http://www.lekti-ecriture.com/contrefeux/Fragments-desord...)
13:21 Écrit par kl loth dans au fil des lectures | Lien permanent | Commentaires (6) | Tags : écriture, individu, intellectuel, multitude, masse, brinkmann |
Commentaires
Écrit par : michel jeannès | mardi, 02 décembre 2008
Écrit par : Léopold | mercredi, 03 décembre 2008
Écrit par : michel jeannès | mercredi, 03 décembre 2008
Écrit par : Arthémisia | mercredi, 03 décembre 2008
Écrit par : michel jeannès | jeudi, 04 décembre 2008
Je ne sais pas quelles étaient les pressions à l'époque pour que les intellectuels et les artistes rendent leur travail accessible au plus grand nombre. L'« idéologie du jour » qu'évoque Brinkmann, la "doxa" si l'on emprunte le terme utilisé par Bourdieu, devait être de parler au nom de la « masse », des classes laborieuses et non de l'élite « bourgeoise ».
Il en reste toujours quelque chose de nos jours, puisque les intellectuels, les artistes se doivent de s'adresser au plus grand nombre. Or peu de gens s'aventurent vraiment à pousser au plus loin la réflexion, ni ne sont dotés d'une hyper sensibilité.
S'adresser au plus grand nombre peut alors impliquer de renoncer au plus sensible de soi… pour ne pas être accusé d'« élitisme ». Il y a là quelque chose d'aporétique…
Il y a aussi la souffrance au quotidien à être perdu dans la foule, le vacarme, bousculé, parfois meurtri physiquement. C'est une souffrance, une perte identitaire probablement partagées par beaucoup…
Écrit par : kl loth | vendredi, 05 décembre 2008
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